Sp. Tarpeius Montanus Capitolinus

RE, IV A 2, 2331-2332, n° 4 (auteur : Fr. Münzer) et G. Niccolini, FTP, p. 32.

Sources 

Cassiod., Chron. (AUC 300) ; Chronogr. a. 354 (AUC 300) ; Chr. Pasc. (AUC 300) ; Cic., rep., 2, 60 ; D.S., 12, 6, 1 ; D.H., 10, 48, 1 et 10, 50 ; Fast. Hyd. (AUC 300) ; Fest., p. 270 L., s.v. peculatus ; Gell., 2, 11, 1 et 11, 1, 2 ; Liv., 3, 31, 5-6 ; 3, 50, 15 ; 3, 65, 1-4 et Plin., nat., 7, 28.

Notice

Sp. Tarpeius est, dans la tradition romaine, lié de façon étroite à la figure d’A. Aternius. C’est un personnage dont le nom complet est, selon les fastes, Sp. Tarpeius M. f. M. n. Montanus Capitolinus[1]. Il s’agit d’un nom rare, d’origine étrusque (on peut d’ailleurs le relier au nom Tarquinius) ou sabine qui fait évidemment penser à la famille de Tarpeia et à son père Sp. Tarpeius. Unique personnage de ce nom connu, il s’agit très certainement d’un patricien qui appartenait à une famille qui s’éteignit dès le Ve siècle[2]. Ses cognomina particuliers sont le fruit d’une invention fondée sur l’équivalence entre les monts Tarpeius et Capitolinus. Ils sont sans valeur historique[3].

Il fut consul en 454 avec A. Aternius. Cette année-là, les anciens consuls T. Romilius et C. Veturius furent mis en accusation par des tribuns de la plèbe : L. Sicinius Dentatus selon Denys d’Halicarnasse ; C. Calvius Cicéron et L. Alienus selon Tite-Live[4]. Mais cette mise en accusation n’effraya nullement les deux nouveaux consuls qui continuèrent de s’opposer au projet de loi de Terentilius Harsa constamment remis en avant par les tribuns de la plèbe depuis 462. Confrontés à ce ferme refus, les tribuns de l’année modifièrent ce projet pour obtenir l’accord des consuls et du patriciat. C’est ainsi que Sp. Tarpeius et A. Aternius acceptèrent la création d’une commission de trois membres chargés de se rendre à Athènes y étudier les lois des Grecs afin de permettre ensuite la rédaction du premier code de lois romain. Enfin, ces deux consuls sont liés à une loi sur les amendes dont il est assez difficile de préciser la teneur exacte en raison de la grande confusion des sources à son sujet. En particulier, il est délicat de préciser qui fut l’auteur de la loi puisque nos sources la nomment soit lex Tarpeia, soit lex Aternia, soit — plus rarement — lex Aternia Tarpeia. L’existence d’une telle disposition réglementaire à cette époque ne fait cependant guère de doute et joue en faveur de l’authenticité de ce personnage[5].

Chez Tite-Live, on retrouve ensuite Sp. Tarpeius en 449, puisqu’au moment de la sécession de la plèbe, il aurait fait partie d’une légation du Sénat envoyée sur l’Aventin pour parlementer. Nous n’en savons guère plus pour cette année. Toutefois, en 448, après la fin de la sécession, il aurait été élu tribun de la plèbe, toujours avec A. Aternius. Cette élection fut un peu particulière. En effet, comme dix tribuns ne furent pas élus, on procéda à une cooptation et Sp. Tarpeius fut choisi, ainsi qu’A. Aternius, pour flatter les patriciens nous dit Tite-Live. S’élevant contre ce type de pratique, le tribun L. Trebonius fit alors passer un plébiscite qui stipulait que ce type de cooptation était interdit et qu’en cas d’élection de moins de dix tribuns, on devrait poursuivre le vote jusqu’à avoir atteint ce nombre (55). Nous ne savons rien du contenu de ce tribunat. Il faut cependant rappeler que Mommsen avait en son temps prétendu que les informations de Tite-Live sur cette élection étaient une interpolation d’un grammairien plus tardif car sa phrase fait presque entièrement défaut dans le palimpseste de Vérone. Weissenborn a, depuis, montré l’impossibilité de cette supposition et Mommsen lui-même l’a retirée[6]. Cela n’enlève pour autant à rien à la question de savoir si des patriciens purent devenir tribuns. Selon P.-Ch. Ranouil, ce tribunat est une invention de Tite-Live. En effet, selon lui, ce dernier a sans doute suivi une source tardive faisant de la lex Aternia, du fait de ses dispositions favorables à la plèbe, un plébiscite et donc, ses rapporteurs devaient être des plébéiens[7]. Surtout, une telle cooptation servait le récit livien puisqu’elle permettait de mieux mettre en valeur la réaction de Trebonius à la cooptation de tribuns et de justifier la grande vigueur des attaques du personnage.

L’existence historique de Sp. Tarpeius nous semble assez peu contestable mais ce personnage fut bien un patricien, consul en 454 puis envoyé du Sénat en 449. Son tribunat de la plèbe en 448 est en revanche une invention.

Notes

[1] CIL I² p. 16.

[2] P.-Ch. Ranouil, Recherches sur le patriciat (509-366 av. J.-C.), Paris : Les Belles Lettres, 1975, p. 118 et p. 129.

[3] C. Ampolo, « I gruppi etnici in Roma arcaica: posizione del problema e fonti », dans Gli Etruschi e Roma. Atti dell’incontro di studio in onore di Massimo Pallottino, Roma, 11-13 dicembre 1979, Rome : G. Bretschneider, 1981, p. 60.

[4] Voir Les notices de L. Alienus, C. Calvius Cicéron et L. Sicinius Dentatus. Ici, la différence entre Tite-Live et Denys trahit très certainement l’utilisation de deux sources opposées.

[5] Sur cette loi, sa signification et son analyse, se reporter à la notice d’A. Aternius et au volume publié.

[6] Th. Mommsen, Le Droit public romain, traduit de l’allemand par P. F. Girard, Paris : E. Thorin, 1889-1896 (réimprimé par de Boccard à Paris en 1984-1985), 3, p. 319, n. 2.

[7] P.-Ch. Ranouil, Recherches sur le patriciat (509-366 av. J.-C.), Paris : Les Belles Lettres, 1975, p. 94-97 et p. 161 mais également R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 513-514 (où il est question de la lex Trebonia), p. 515 et p. 648.