Sp. Maelius

RE, XIV 1, 244, n° 3 (auteur : Fr. Münzer) ; BNP, 8, 114, n° 2 (auteur : Chr. Müller) et G. Niccolini, FTP, p. 37.

Source

Cic., dom., 86 ; Liv., 4, 21, 3-5 ; Paris, 5, 3, 2g et Val. Max., 5, 3, 2g.

Notice

Sp. Maelius aurait été tribun de la plèbe en 436 et serait ainsi un parfait homonyme du Sp. Maelius mort en 439, trois ans auparavant. Une telle proximité soulève évidemment la question de l’éventuelle identité de ces deux figures. Münzer, dans son article de la Realencyclopädie sur le tribun de 436 estimait qu’il ne fallait sans doute pas les différencier et il est suivi par Momigliano mais Broughton est d’un avis différent et plus convaincant[1].

Le Sp. Maelius de 439 était un très riche chevalier romain. Alors que Rome traversait une période de disette, il fit acheter un stock de blé en Étrurie pour le distribuer à la plèbe, devenant très populaire. Tite-Live et Denys d’Halicarnasse indiquent qu’il se mit très rapidement à aspirer à la royauté et que, ce faisant, il s’opposa de plus en plus fortement à L. Minucius, alors officiellement chargé du ravitaillement en blé de la ville de Rome. Ce dernier aurait découvert le complot de Maelius ainsi qu’une cache d’armes. Il saisit le Sénat de l’affaire, lequel nomma Cincinnatus dictateur et C. Servilius Ahala, maître de cavalerie. Après quelques péripéties, Ahala finit par tuer Maelius tandis que ce dernier s’enfuyait et appelait le peuple à son secours. Sa maison fut détruite et ses biens furent vendus au profit du trésor. Notons que Denys d’Halicarnasse conserve une seconde version de sa fin, sans aucun doute plus ancienne puisqu’il l’attribue à Cincius Alimentus et à Pison. Dans ce récit, toute l’affaire du dictateur est passée sous silence tandis que le sort de Maelius apparaît pour ce qu’il fut : un assassinat prémédité et délibéré d’une figure gênante pour les Pères. Cette seconde version fait immanquablement penser au sort similaire de Sp. Cassius[2].

En tant que tribun de la plèbe, le Sp. Maelius de 436 a une activité bien connue et bien différenciée de celle du Maelius de 439 mais qui n’est exposée que dans le récit livien. Il fut dans un premier temps le rapporteur d’un projet de loi qui avait pour but de venger la mort de son homonyme en visant à confisquer les biens de C. Servilius Ahala. Le motif de ce projet était que Minucius aurait impliqué le premier Maelius dans de fausses accusations, et qu’Ahala l’aurait tué sans jugement. Chez Tite-Live, ces tentatives ne débouchèrent sur rien, mais Valère Maxime et son abréviateur mentionnent, eux, une condamnation à l’exil de Servilius Ahala ce qui pourrait être une référence à l’action du tribun de la plèbe de 436. Ces accusations sont d’inspiration tardo-républicaine et, en particulier, post-grachienne, ce qui affaiblit l’authenticité du personnage[3]. En conséquence il s’agit très vraisemblablement d’un doublet sans valeur historique à partir du personnage — peut-être authentique lui — de Sp. Maelius.

Notes

[1] RE, XIV 1, 244, n° 3, A. Momigliano, « Due punti di storia romana arcaica », SDHI, 2/2, 1936, p. 379-383 (= Id.Quarto contributo alla storia degli studi classici e del mondo antico, Rome : Edizioni di storia e letteratura, 1969, p. 337-341) et T. R. S. Broughton, MRR, 1, p. 60.

[2] Sur toute cette affaire, les sources sont : Ann. Pont., frgt 21 Chassignet (= frgt 21 P2 = 21 F1 = p. 300 F2) ; Ampel., 27, 2 ; Aug., ciu., 3, 17 ; Calp. hist., frgt 26 Chassignet (= frgt 24 P2 = 31 F = 25 B) ; Cic., Cat., 1, 3 ; dom., 86 et 101 ; Mil., 8, 72 et 83 ; Sest., 143 ; Phil., 2, 26, 87 et 114 ; sen., 56 ; Lael., 28 et 36 ; Or., 153 ; rep., 1, 6 et 2, 49 ; et att., 2, 24, 3 et 13, 40, 1 ; Cinc. Alim., frgt 8 Chassignet (= 6 P2 = 4 J = 6 F1) ; D.H., 12, 1 à 12, 4 ; Flor., epit., 1, 17, 7 ; Quint., inst., 5, 13, 24 ; Liv., 4, 13, 1 à 4, 16, 4 ; Liv., perioch., 4 ; Paris, 5, 3, 2g et 6, 3, 1a-1d ;Val. Max., 5, 3, 2g et 6, 3, 1a-1d ; Vir. ill., 17, 5 ; et Zonar., 7, 20. Voir aussi RRC I, p. 289, n° 264 (où M. Crawford prend position contre le fait de voir une référence à Ahala dans cette monnaie) et I, p. 455, n° 433. On se reportera également, outre la notice de Münzer dans la RE, XIV 1, 239-244, n° 2 et notre propre notice sur L. Minucius, à B. G. Niebuhr, Histoire romaine, traduit de l’allemand sur la 3e édition par P.-A. de Golbéry, Bruxelles : Société belge de librairie, 1842, 2, p. 413-419 ; Th. Mommsen, « Sp. Cassius, M. Manlius, Sp. Maelius, die drei Demagogen der älteren republikanischen Zeit », Hermes, 5, 1871, p. 228-271 (= Römische Forschungen, 2, Berlin : Weidmann, 1879, p. 153-220) ; R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 550-557 ; A. W. Lintott, « The Tradition of Violence in the Annals of the Early Roman Republic », Historia, 19, 1970, p. 13-18 ; J. Gagé, « Les chevaliers romains et les grains de Cérès au Ve siècle avant J.-C. », Annales ESC, 25, 1970, p. 287-311 ; H. Zehnacker, Moneta. Recherches sur l’organisation et l’art des émissions monétaires de la République romaine (289-31 avant J.-C.), Rome : EFR, 1973, p. 511-512, p. 516, p. 701-702 et p. 998-1002 ; P.-Ch. Ranouil, Recherches sur le patriciat (509-366 av. J.-C.), Paris : Les Belles Lettres, 1975, p. 193-194 ; A. Valvo, « Le vicende del 44-43 a.C. nella tradizione di Livio e di Dionigi su Spurio Melio », dans M. Sordi (éd.), Contributi dell’istituto di storia antiqua, 3, Storiografia e propaganda, Milano : Vita e Pensiero, 1975, p. 157-183 ; D. Sabbatucci, « Il racconto romano della regalità », dans La Struttura della fabulazione antica, Sassari : Università di Genova, 1979, p. 9-25 ; L. Bessone, « Per una rilettura di Floro I, 17 (26), 7 », Latomus, 44, 1985, p. 165-172 ; B. Liou-Gille, « La sanction des leges sacratae et l’adfectatio regni : Spurius Cassius, Spurius Maelius et Manlius Capitolinus », PP, 51, 1996, p. 161-197 ; A. Vigourt, « Les adfectatores regni et les normes sociales », et Ead., « L’intention criminelle et son châtiment : les condamnations des aspirants à la tyrannie » dans M. Coudry et Th. Späth (éd.), L’Invention des grands hommes de la Rome antique : actes du colloque du Collegium beatus rhenanus (Augst, 16-18 septembre 1999), Paris : De Boccard, 2001 p. 333-340 et p. 271-287.

[3] Cf. le volume publié, dans le chapitre sur les procès tribunitiens, et notamment p. 474.