Q. Considius

RE, IV 1, 912-913, n° 6 (auteur Fr. Münzer) ; BNP, 3, 701, n° I 1 (auteur : K.-L. Elvers) et G. Niccolini, FTP, p. 12.

Sources

D.C., 5, frgt 21, 3 Boissevain ; D.H., 9, 27, 1-5 et Liv., 2, 52, 2-5.

Notice

Q. Considius fut tribun de la plèbe en 476 avec T. Genucius qui est le seul collègue que nous lui connaissions. Nous ne savons quasi rien de lui et le nom de ce tribun pose quelques problèmes. En effet, on le trouve chez Tite-Live et chez Denys d’Halicarnasse. Or les manuscrits fournissent les leçons suivantes : Κοίντου καὶ Κοιντιλίου (Chisianius 58 et Coislinianus 150) et Κοίντου Κοιντίνου (Urbinas 105). Κωνσιδίου est en fait une correction de Sigonius suivie par Jacoby. La première version des manuscrits pose problème car le texte de Denys d’Halicarnasse fait référence à deux tribuns et il y en aurait ainsi trois. Celle de l’Urbinas transforme le nom en Quintus Quintinus. Ce gentilice existe mais est extrêmement rare. Surtout, la correction de Sigonius trouve en fait son explication dans le témoignage de Tite-Live. Là, en effet, il n’est question que de deux tribuns — Q. Considius et T. Genucius — et les manuscrits ne soulèvent aucun problème. Cette correction nous semble donc pleinement justifiée et mérite d’être suivie.

Avec son collègue, Q. Considius se signala d’abord en soulevant de nouveau la question agraire[1] et, ensuite, par la mise en accusation du consul de l’année précédente, T. Menenius. Le motif officiel de l’accusation était qu’il aurait laissé prendre le camp du Crémère. Toutefois, comme ces tribuns se firent dans le même temps les promoteurs de la loi agraire, il est possible que cette accusation ait aussi eu un but politique : menacer les patriciens par une forme de chantage afin de faciliter l’adoption de la loi. En tous les cas, T. Menenius fut condamné à une amende de 2 000 as (il mourut peu de temps après) et la loi agraire ne fut pas votée.

Ce récit est le premier procès de patriciens depuis celui, assurément fictif, de Coriolan en 491[2]. La possibilité de tels procès à une date si haute est problématique, et elle l’est d’autant plus que celui-ci n’est que le début d’une longue série. Dans la lignée des travaux de J. Bleicken, la tendance est à les déclarer impossibles. Ainsi, Ogilvie et P.-Ch. Ranouil estiment que ces deux tribuns et ce procès sont des faux[3]. La réalité est sans doute plus complexe même si le nom de Considius doit être considéré avec prudence[4]. Au sein de ce cadre, l’existence de ce procès est un peu particulière en raison d’une information apportée uniquement par Denys d’Halicarnasse. En effet, la condamnation de Menenius choqua tellement qu’elle aurait conduit à fixer, pour la première fois, une somme maximale aux amendes. Il y a là indubitablement trace de l’utilisation d’une source différente par l’historien grec et cela pourrait aller dans le sens d’une historicité du procès. En revanche, en raison de l’histoire même de sa famille, l’authenticité de Q. Considius paraît des plus douteuses et il pourrait s’agir d’un simple nom plaqué sur des bribes d’informations historiques[5].

Notes

[1] G. Rotondi, LPPR, p. 195.

[2] Sur Coriolan, cf. le volume publié p. 451-456.

[3] R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 369 et P.-Ch. Ranouil, Recherches sur le patriciat (509-366 av. J.-C.), Paris : Les Belles Lettres, 1975, p. 99-100.

[4] Cl. Lovisi, « Les origines d’une coutume à Rome : naissance du procès populaire d’amende », dans G. Constable et M. Rouche (éd.), Auctoritas : Mélanges offerts au professeur Olivier Guillot, Paris : PUPS, 2006, p. 45-56. Cf. notre présentation des procès tribunitiens archaïques dans le volume publié.

[5] E. Pais, Ricerche sulla storia e sul diritto pubblico di Roma, Rome : P. Maglione & C. Strini, 3, 1918, p. 67.