M. Duilius

RE, V 2, 1781-1782, n° 6 (auteur : Fr. Münzer) ; BNP, 4, 736-737, n° 3 (auteur : K.-L. Elvers) et G. Niccolini, FTP, p. 16-17.

Sources

Calp. hist., frgt 25 Chassignet (= frgt 23 P1 et 2 = frgt 30 F = frgt 24 B, apud Liv., 2, 58, 1) ; Cic., rep., 2, 54 (sur le droit d’appel) ; D.S., 11, 68, 8 ; D.H., 11, 46, 5 ; Liv., 2, 58, 1-2 ; 2, 61, 1-9 ; 3, 35, 4-5 ; 3, 52, 1-2 ; 3, 54, 11-15 ; 3, 55, 12-15 ; 3, 59, 1-5 et 3, 64, 4 à 11.

Notice

M. Duilius apparaît comme tribun de la plèbe en 470, dans le premier collège tribunitien élu après l’adoption du plébiscite de Volero Publilius (29), puis une nouvelle fois en 449. Sur ce nom, la tradition manuscrite ne pose guère de problème même si on retrouve l’hésitation classique entre Duillius et Duellius. Chez Tite-Live en particulier, les manuscrits sont en général unanimes à proposer l’orthographe Duellius, rétablie en Duillius à la suite de corrections de Sigonius. Il s’agit de variantes minimes qui ne prêtent pas à conséquence. En tant que tribun de la plèbe, il se fit d’abord connaître en 470, en intentant un procès au consul de l’année précédente, Ap. Claudius. Il le fit avec son collègue Cn. Siccius. La défense vigoureuse d’Ap. Claudius impressionna les tribuns qui laissèrent le procès traîner en longueur. Celui-ci n’arriva jamais à son terme puisque Claudius mourut entre temps. Il semble que des tribuns aient voulu empêcher sans succès qu’on prononçât l’éloge funèbre du défunt. Étant donné l’attitude de Duilius, il est raisonnable de penser qu’il fit partie de ce groupe de tribuns mais rien ne le dit explicitement. Tite-Live rapporte plus tard qu’il avait laissé la réputation d’un bon tribun, remplissant bien sa fonction. Comme il n’est connu que pour ce procès, on pourrait penser que, dans l’esprit du Padouan, ce type d’action correspondait à ce qui était attendu d’un tribun de la plèbe. Son rôle ne s’achève cependant pas là et il fut un personnage d’importance par la suite, ce qui nous paraît devoir conduire à une interprétation différente de cette appréciation de Tite-Live.

M. Duilius fut en effet un des meneurs de la deuxième sécession de la plèbe en 450-449. C’est lui qui soutint la plèbe dans son combat contre les décemvirs, c’est lui qui l’informa des dissensions au sein du Sénat et c’est encore lui qui lui conseilla de se retirer une nouvelle fois sur le mont Sacré afin de se faire entendre. Élu tribun une seconde fois, il fit partie du premier collège tribunitien qui suivit la chute des décemvirs. Il s’y signala en faisant voter un plébiscite qui rétablissait le consulat et le droit d’appel (48). Véritable chef du collège, il y occupa un rôle d’importance (peut-être à cause de son premier tribunat) puisqu’il imposa également la fin des poursuites judiciaires à l’encontre des anciens décemvirs afin d’éviter une spirale de vengeance. Il termina sa carrière en présidant les élections suivantes. Là encore, c’est l’occasion pour Tite-Live de dresser l’éloge de la modération et du sens politique du personnage puisqu’il combattit la volonté des tribuns de la plèbe en place de se faire réélire et permit du même coup au système politique romain de se remettre correctement en marche. Il permit en outre de faire passer la cooptation de candidats patriciens : A. Aternius et Sp. Tarpeius, personnages dont les tribunats sont douteux[1].

L’authenticité de M. Duilius ne fait guère de doute même si la réalité de son second tribunat est parfois sujette à caution[2]. On retrouve en effet de larges parallèles entre le collège de 449 et celui de 470 : des noms identiques, le contexte du procès d’un Ap. Claudius ou des lois affermissant le tribunat de la plèbe. Bref, la similitude est forte et P.-Ch. Ranouil en tire la conclusion que Duilius a bien existé mais ne fut tribun qu’en 470. L’argument n’est pas totalement déterminant et on peut penser qu’il fut bien tribun les deux fois même si on doit alors préciser que tous les éléments ajoutés par nos sources et qui font de ce Duilius un grand homme d’État ont certainement été retravaillés à partir de la figure majeure des Duilii : C. Duilius, qui fut consul en 260 et censeur en 258 et qui est resté comme une figure marquante de la République romaine[3].

Notes

[1] Voir leur notice respective.

[2] R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 495-496 émet de forts doutes sur ce sujet et P.-Ch. Ranouil, Recherches sur le patriciat (509-366 av. J.-C.), Paris : Les Belles Lettres, 1975, p. 104 la rejette catégoriquement.

[3] Voir J. Suolahti, The Roman Censors. A Study on Social Structure, Helsinki : Weilin & Göös, 1963, p. 269-271.