Sempronii

Les Sempronii sont une très importante lignée romaine. Le nom de Sempronius paraît plutôt d’origine latine. W. Schur leur donne une origine ombrienne à partir du surnom Tuditanus qu’il rapproche de Tuder. Cet argument a cependant ceci de gênant qu’il délaisse les Sempronii antérieurs et se focalise uniquement sur ce cognomen[1]. Or, nous savons aussi par certaines inscriptions que les Sempronii des deux derniers siècles de la République appartenaient à la tribu Falerna, créée en 318 et qui avait servi à des déductions viritanes pour des citoyens romains[2]. S’il s’agit de leur tribu d’origine, il faut donc que les Sempronii aient déjà été citoyens à ce moment alors que les premiers Sempronii Tuditani n’apparaissent que plus tard. Si, en outre, on estime à la suite de Ranouil que la famille a bien eu une branche patricienne et une branche plébéienne et, donc, que les Sempronii Atratinii du début de la République sont authentiques, alors l’ensemble des indices va bien plutôt dans le sens d’une origine ancienne de cette famille[3]. Même si on doit noter la présence de Sempronii dans une tombe de Vulci du IIIe siècle[4], l’argument n’est guère probant car la colonie de Cosa a été fondée en 273 sur le territoire de Vulci. Le tout va donc plutôt dans le sens d’une vieille origine latine de cette famille et, d’ailleurs, l’épigraphie latine, majoritairement romaine et tardive, abonde en ce sens même si sa date ne rend pas l’argument complètement déterminant[5]. Les membres de cette famille sont très nombreux à l’époque républicaine :

  • Sempronius Atratinus (20), consul en 497, préfet de la ville en 499 ou 496, consul une seconde fois en 491, légat lieutenant ou préfet de la ville en 487, peut-être tribun militaire en 486 et interroi en 482 ;
  • Sempronius Atratinus (21), tribun militaire à pouvoirs consulaires en 444 ;
  • L. Sempronius Atratinus (25), consul suffect en 444, censeur en 443 ;
  • Sempronius Atratinus (2 et 22), consul en 428, tribun militaire à pouvoirs consulaires en 425, 420 puis 416 ;
  • Sempronius Atratinus (24), consul en 423 ;
  • Sempronius Atratinus (23), maître de cavalerie en 380 ;
  • P. Sempronius Sophus (85), tribun de la plèbe en 310, consul en 304, censeur en 300, préteur en 296 et pontife de 300 à une date inconnue ;
  • P. Sempronius Sophus (86), consul en 268 et censeur en 252 ;
  • Sempronius Blaesus (28), consul en 253 et 244 ;
  • Ti. Sempronius Gracchus (50), édile plébéien en 246 et consul en 238 ;
  • M. Sempronius Tuditanus (93), consul en 240 et censeur en 230 ;
  • Ti. Sempronius Longus (66), consul en 218, peut-être légat lieutenant en 215 et décemvir sacris faciundis depuis une date inconnue jusqu’à 210 ;
  • Ti. ? Sempronius Blaesus (32), questeur en 217 ;
  • Ti. Sempronius Gracchus (51), édile curule en 216, maître de cavalerie en 216, consul en 215, proconsul en 214, consul une seconde fois en 213, proconsul en 212 ;
  • P. Sempronius Tuditanus (96), tribun militaire en 216, édile curule en 214, préteur en 213, promagistrat en 212-211, censeur en 209, proconsul en 205, consul en 204, proconsul en 203, légat ambassadeur en 201-199 ;
  • C. Sempronius Blaesus (29), tribun de la plèbe en 211 et légat lieutenant en 210[6] ;
  • M. Sempronius Tuditanus (94), peut-être tribun militaire en 209 ;
  • Ti. Sempronius Gracchus (52, voir 53), augure en 204 ;
  • Ti. Sempronius Longus (67), tribun de la plèbe en 200, édile curule en 198, triumvir coloniae deducendae en 197-194, préteur en 196, promagistrat en 195, consul en 194, peut-être proconsul en 193, légat lieutenant cum imperio en 193, légat lieutenant en 191, peut-être légat ambassadeur en 185-184, décemvir sacris faciundis de 210 à 174, peut-être augure de 210 à 174[7] ;
  • Sempronius Tuditanus (90), édile plébéien en 198, préteur en 197, proconsul en 196 et pontife depuis une date inconnue jusqu’à 196 ;
  • T. (ou Ti.) Sempronius Gracchus (60), préfet des alliés en 196 ;
  • P. Sempronius (11), préfet des alliés en 194 ;
  • M. Sempronius Tuditanus (95), tribun de la plèbe en 193, préteur en 189, propréteur en 188, consul en 185 et pontife de 183 à 174[8] ;
  • P. Sempronius Blaesus (31), tribun de la plèbe en 191[9] ;
  • Ti. Sempronius Gracchus (53), légat envoyé en 190, légat ambassadeur en 185 et peut-être en 184, tribun de la plèbe en 187 ou 184, triumvir coloniae deducendae en 183, édile curule en 182, préteur en 180, proconsul en 179-178, consul en 177, proconsul en 176-175, censeur en 169, légat ambassadeur en 165, consul une seconde fois en 163, proconsul en 162, légat ambassadeur en 162-161 et augure peut-être depuis 204 jusqu’à une date inconnue[10] ;
  • Sempronia (99), fille du (53) et sœur des Gracques ;
  • P. Sempronius Gracchus (49), tribun de la plèbe en 189[11] ;
  • Sempronius Rutilus (81), tribun de la plèbe en 189[12] ;
  • Sempronius Blaesus (30), édile plébéien en 187, préteur en Sicile en 184 et légat ambassadeur en 170 ;
  • T. (ou Ti.) Sempronius Rutilus (83), impliqué dans l’affaire des Bacchanales de 186 ;
  • P. Sempronius Longus (65), préteur en 184 et proconsul en 183-182 ;
  • Ti. Sempronius Gracchus Veturianus (voir Veturius), augure à partir de 174 jusqu’à une date inconnue ;
  • Sempronius Longus (63), décemvir sacris faciundis à partir de 174 jusqu’à une date inconnue ;
  • T. Sempronius Musca (72), quinquevir finibus cognoscendis statuendisque en 168 ;
  • Ti. Sempronius (12), tribun de la plèbe en 167[13] ;
  • Sempronius, sénateur vers 165 ;
  • L. Sempronius (9), monétaire vers 150-125 ;
  • Sempronius Tuditanus (91), préteur peut-être en 147, légat ambassadeur en 146-145 ;
  • Ti. Sempronius Gracchus (54), officier de Scipion en 147-146, questeur en 137, légat envoyé en 137, tribun de la plèbe en 133, triumvir agris iudicandis assignandis en 133 et augure depuis une date inconnue jusqu’à 133[14] ;
  • Sempronius Gracchus (40), fils du (54) ;
  • Sempronius Gracchus (38), deuxième fils du (54) ;
  • Sempronius Gracchus (39), troisième fils du (54) ;
  • (Ti. ?) Sempronius Gracchus (55), quatrième fils du (54) ;
  • L. Sempronius Pitio (74), monétaire vers 145-138 ;
  • Sempronius Tuditanus (92), questeur en 145, peut-être édile curule en 135, préteur en 132, consul en 129 ;
  • Sempronius Tuditanus (89), fils du (92) ;
  • Sempronia (100), fille du (92) ;
  • Sempronia (102), fille du (89) ;
  • Sempronius (3), sénateur vers 140 ;
  • C. Sempronius Gracchus (47), peut-être tribun militaire vers 134-132, triumvir agris iudicandis assignandis de 133 à 121, questeur en 126, proquesteur en 125-124, tribun de la plèbe en 123-122, triumvir coloniae deducendae en 122-121[15] ;
  • Sempronius Asellio (16), tribun militaire en 134-132 ;
  • Sempronius (5, voir 6), sénateur en 129 ;
  • L. Sempronius (10), magister pagi dans la région de Capoue vers 108 ;
  • C. (Sempronius) Longus (64), légat lieutenant vers 96 ;
  • L. (Sempronius) Asellio ? (18), préteur vers 96 et peut-être décemvir agris dandis assignandis en 91 ;
  • et M. Sempronius Musca (71), deux frères vivant vers 91 ;
  • A. Sempronius Asellio (17), peut-être décemvir agris dandis assignandis en 91 et préteur en 89 ;
  • Ti. (Sempronius) Longus (68), mentionné sur le testament du (89) à l’époque syllanienne ;
  • M. Sempronius Rutilus (82), légat lieutenant en 52 ;
  • Sempronius (1), cité par Appien comme assassin de Cn. Pompée ;
  • Sempronius Rufus (79), préteur avant 44[16] ;
  • L. Sempronius Atratinus (26), peut-être préteur suffect en 40, légat lieutenant propréteur peut-être en 39-37, peut-être préfet de la marine propréteur en 36, consul suffect en 34, augure de 40 à 7 après J.-C.[17] ;
  • Ti. Sempronius Gracchus (56), quattuorvir monetalis vers 40 et questeur désigné peut-être en 37 ;
  • Cn. Sempronius et Sempronia (8), mentionnés sur une inscription funéraire d’époque républicaine ;
  • (Sempronius ?) Gr(acchus ?) (voir 37), monétaire à une date inconnue mais assez haute ;
  • M. (Sempronius) Rufus, proconsul à une date inconnue.

Cette lignée fut donc très bien représentée de façon continue. Elle connut cependant une période durant laquelle elle fut particulièrement puissante : les IIIe et IIe siècles en général mais plus particulièrement entre 250 et 120. Après l’épisode des Gracques, elle perdit de sa prépondérance sans disparaître pour autant et est encore attestée sous l’Empire. Il est possible de proposer des reconstitutions de la généalogie des Sempronii du début de la République. La branche patricienne des Atratini se laisse assez facilement reconstituer. Seul sont délicats à positionner C. Sempronius Atratinus consul en 423 et A. Sempronius Atratinus maître de cavalerie en 380. En raison du prénom, nous proposons de faire du maître de cavalerie le fils d’A. Sempronius Atratinus, consul en 428. Pour C. Sempronius Atratinus, en l’absence d’indice, nous le rattachons arbitrairement à l’autre branche mais il pourrait aussi descendre du consul de 444. Cela donne le stemma suivant :

Semptonii 1

Il est également possible de rapprocher les deux Sempronii Sophi connus selon le schéma suivant :

Sempronii 2

Notes

[1] W. Schulze, Zur Geschichte lateinischer Eigennamen, Zürich et Hildesheim : Weidmannsche Buchhandlung, 1904, p. 211 et p. 348 mais qui n’analyse pas réellement l’origine de ce nom et W. Schur, « Fremder Adel im römischen Staat der Samniterkriege », Hermes, 59, 1924, p. 470-473. Sur les thèses de Schur, des réserves avaient déjà été émises par K.-J. Beloch, Römische Geschichte bis zum Beginn der punischen Kriege, Berlin : W. de Gruyter, 1926, p. 338 et J. Heurgon, Recherches sur l’histoire, la religion et la civilisation de Capoue préromaine des origines à la deuxième guerre punique, Rome : EFR, 1942, p. 260.

[2] L. Ross Taylor, The Voting Districts of the Roman Republic, The Thirty Five Urban and Rural Tribes, Rome : American Academy in Rome, 1960, p. 55-56 et p. 252-253.

[3] Voir BNP, 13, 243 ; J. Suolahti, The Junior Officers of the Roman Army in the Republican Period. A study on Social Structure, Helsinki : Weilin & Göös, 1955, p. 154, p. 157, p. 161 et p. 387-388 ; Id., The Roman Censors. A Study on Social Structure, Helsinki : Weilin & Göös, 1963, p. 123-124, p. 169-171, p. 235-237, p. 319-321, p. 372-373, p. 538 et p. 715-716 ; P.-Ch. Ranouil, Recherches sur le patriciat (509-366 av. J.-C.), Paris : Les Belles Lettres, 1975, p. 172-175 et R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 289.

[4] H. H. Scullard, The Etruscan Cities and Rome, Cornell : CUP, 1967, p. 124.

[5] Sur des cippes gracquiens : CIL, I2, 639 (= ILLRP, 470) ; 640 (= X, 3861 = ILLRP, 467) ; 641 (= X, 3760 = ILLRP, 468) ; 643 (= IX, 1024 = ILLRP, 473) ; 644 (= IX, 1025 = ILLRP, 473) ; mais aussi CIL, I2, 653 (= XV, 4596, Rome) ; 1156 (= VI, 8352, Rome) ; 1157 (= VI, 8353 = ILS, 7839 = ILLRP, 892, Rome) ; 1158 (= VI, 8354, Rome) ; 1294 (= VI, 16503, Rome) ; 1381 (= VI, 26152, Rome) ; 652 (= ILS, 8885 = ILLRP, 335, Aquilée) ; 2503 ( = ILLRP, 334, Aquilée) ; 675 (= X, 3776 = ILS, 3185 = ILLRP, 709, Capoue) et 676 (= X, 3777, Capoue).

[6] G. Niccolini, FTP, p. 95-96.

[7] Ibid., p. 103-104.

[8] Ibid., p. 108-109.

[9] Ibid., p. 109-110.

[10] Ibid., p. 111-115.

[11] Ibid., p. 110-111.

[12] Ibid., p. 110-111.

[13] Ibid., p. 127-128.

[14] Ibid., p. 142-151.

[15] G. Niccolini, FTP, p. 158-164 et J.-M. David, Le Patronat judiciaire au dernier siècle de la République romaine, Rome : EFR, 1992, p. 697-699.

[16] J.-M. David, Le Patronat judiciaire au dernier siècle de la République romaine, Rome : EFR, 1992, p. 876.

[17] CIL, I2, 1, p. 60 et J.-M. David, Le Patronat judiciaire au dernier siècle de la République romaine, Rome : EFR, 1992, p. 897-898.