Laetorii

Cette lignée plébéienne possède un nom peu attesté sous la République. Son origine est difficile à préciser et l’épigraphie latine — tardive — n’apporte pas d’indication probante[1]. Les Laetorii, souvent confondus dans les manuscrits avec les Plaetorii, sont bien représentés à Rome mais essentiellement pour les IIIe et IIe siècles :

  • M. Laetorius (8), centurion primipile élu par le peuple pour dédicacer le temple de Mercure en 495[2] ;
  • C. Laetorius (1), tribun de la plèbe en 471 ;
  • C. (ou M.) Laetorius Mergus (11), tribun militaire après 313 ;
  • M. Laetorius Plancianus (12), maître de cavalerie en 257 ;
  • C. Laetorius (2), édile curule en 216, légat envoyé en 212, peut-être préteur en 210 et propréteur en 209, légat lieutenant en 205 et 200, triumvir coloniae deducendae en 194 et décemvir sacris faciundis à partir de 209 ;
  • L. Laetorius (7), édile de la plèbe en 202[3] ;
  • P. Laetorius (10), défenseur de C. Gracchus en 121 ;
  • Cn. Laetorius (6), magister pagi à Capoue en 94 ;
  • C. Laetorius (4), membre du consilium de Cn. Pompeius Strabo en 90 ;
  • M. Laetorius (9, voir Plaetorius, 11), rangé au nombre des 12 hostes publici de 88 ;
  • P. Laetorius (voir 9 et Plaetorius, 11), sénateur, exécuté lors de la proscription de 82[4].

Si la possibilité de l’existence de Laetorii pour une période très ancienne ne peut être rejetée, en particulier parce que le nom du dédicant du temple dut être conservé[5], il faut noter que c’est surtout à partir du IIIe siècle que ces personnages sont vraiment attestés. Cette famille se maintint ensuite sous la République mais n’occupa plus de magistrature et est peu attestée sous l’Empire, signe d’un certain déclin[6]. Il est clair que le centurion de 495 et le tribun de la plèbe de 471, si on accepte leur authenticité, furent des proches sans qu’il soit possible de préciser leur lien de parenté. De même, on voit se dessiner des branches familiales au IIIe siècle avec Laetorius Plancianus ou Laetorius Mergus mais elles n’eurent pas de réelle postérité. Sur la fin de la République enfin, une certaine continuité familiale est repérable. La disparition des Laetorii pourrait s’expliquer par le fait qu’ils furent visiblement des proches des Gracques mais aussi des victimes des proscriptions syllaniennes, soit des membres actifs de l’opposition[7]. Cette proximité gracquienne et cette sorte de tradition familiale d’opposants pourraient alors expliquer l’intérêt qu’ils eurent à inventer des Laetorii pour le Ve siècle.

Notes

[1] CIL, I2, 682 (= X, 3772 = ILS, 6302 = ILLRP, 719, Caserte) ; 709 (= VI, 37045 = ILS, 8888 = ILLRP, 515 = SupplIt Imagines, CIL, VI, 1, Musei Capitolini, 2228, Rome) ; 1323 (= VI, 21051 = SupplIt Imagines, CIL, VI, 2, Musei Vaticani, 1, Antiquarium communale del Celio, 2987, Rome) ; 2526 (= VI, 39770, Rome) et 2053 (= XI, 1992, Pérouse). Cf. BNP, 7, 169-170 ; W. Schulze, Zur Geschichte lateinischer Eigennamen, Zürich et Hildesheim : Weidmannsche Buchhandlung, 1904, p. 187 (qui propose évidemment une origine étrusque) ; J. Suolahti, The Junior Officers of the Roman Army in the Republican Period. A study on Social Structure, Helsinki : Weilin & Göös, 1955, p. 100, p. 155 et p. 367 et R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 303.

[2] Sur ce personnage, cf. J.-Cl. Richard, Les Origines de la plèbe romaine : essai sur la formation du dualisme patricio-plébéien, Rome : EFR, 1978, p. 513-519 ; B. Combet-Farnoux, Mercure romain. Le culte public de Mercure et la fonction mercantile à Rome de la République archaïque à l’époque augustéenne, Rome : EFR, 1980, p. 18-35 ; J.-Cl. Richard, « M. Laetorius primi pili centurion : à propos de la dédicace du temple de Mercure », dans V. Lanternari, M. Massenzio et D. Sabbatucci, Scritti in memoria di Angelo Brelich, Bari : Dedalo, 1982, p. 501-509 et St. P. Oakley, Commentary, 3, p. 621-622.

[3] T. R. S. Broughton, MRR, 3, p. 195-196.

[4] Sur ce personnage et les problèmes d’identification posés, voir Fr. Hinard, Les Proscriptions de la Rome républicaine, Rome : EFR, 1985, p. 364-365.

[5] J.-Cl. Richard, Les Origines de la plèbe romaine : essai sur la formation du dualisme patricio-plébéien, Rome : EFR, 1978, p. 513-519 et B. Combet-Farnoux, Mercure romain. Le culte public de Mercure et la fonction mercantile à Rome de la République archaïque à l’époque augustéenne, Rome : EFR, 1980, Rome, 1980, p. 32-35 et p. 43-45.

[6] Voir Fr. Münzer, APF, p. 86 et R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 303.

[7] RE, XII, 1, 448 la présentation des Laetorii et Fr. Hinard, Les Proscriptions de la Rome républicaine, Rome : EFR, 1985, p. 365 avec la bibliographie.