Icilii

La famille des Icilii est une très importante famille plébéienne du début de la République. Elle est d’origine latine et Pais proposait de la rapprocher d’un mont Vecilius situé près de l’Algide et de Tusculum mais aussi, par la même occasion, de Spusius Vecilius Laviniensis mentionné par Denys d’Halicarnasse et du cognomen de Sp. Cassius[1]. Aucun élément déterminant ne permet de proposer une origine géographique précise et il n’existe pas d’attestation épigraphique républicaine de ce gentilice. Ce nom existe cependant bien et se retrouve sur des inscriptions impériales, notamment africaines, mais en petit nombre[2]. Qui plus est, cette famille disparaît totalement de nos sources après le IVe siècle. Elle est au contraire bien attestée pour les Ve et IVe siècles, et se retrouve mêlée à tous les grands moments de l’histoire du conflit des ordres. Ce pourrait donc être une famille purement romaine. Les Icilii attestés sont :

  • C. Icilius Ruga (voir 5), tribun de la plèbe en 493 et édile de la plèbe en 491 ;
  • Sp. Icilius (5), tribun de la plèbe en 470 ;
  • L. Icilius (2), tribun de la plèbe en 456, 455 et 449 ;
  • Icilius ( ?), soldat dans la cohorte de L. Sicinius Dentatus ;
  • M. Icilius (4), fils du précédent et soldat de la cohorte de L. Sicinius Dentatus ;
  • L. Icilius (3), tribun de la plèbe en 412 et 409 ;
  • Icilius (voir 3), tribun de la plèbe en 409 ;
  • Icilius (voir 3), tribun de la plèbe en 409.

Ajoutons qu’un Icilius (1) est mentionné par Appien comme juge lors du procès de Brutus et Cassius mais les manuscrits ne s’accordent pas sur le nom exact de ce personnage qui pourrait très bien être un Sicilius ou un Silicius[3]. Trois éléments incitent à douter de l’authenticité de ce personnage : une incertitude sur son nom, le fait qu’Appien soit le seul auteur à mentionner son existence, et le fait que la présence d’un Icilius, dans un tel contexte et liée à de tels noms, paraît des plus suspecte tant elle correspond à l’image canonique des Icilii. Nous pensons donc qu’il ne faut pas en tenir compte et qu’il s’agit d’une famille que l’on ne trouve qu’à l’époque alto-républicaine. Au sein de cette famille, il est possible, avec Ogilvie, de faire de ce L. Icilius, un fils du tribun de 456 et 455 qui avait combattu le décemvir Ap. Claudius[4]. À partir des données fort maigres dont on dispose on peut tenter de reconstruire leur généalogie. Le seul problème est alors de rattacher les deux soldats à la branche tribunitienne, surtout en l’absence d’âge. Sachant en outre que C. Icilius Ruga et Sp. Icilius sont très certainement des personnages inventés[5], on pourrait imaginer le stemma hypothétique suivant :

Icilii

Au-delà des ces aspects indécidables, il est certain qu’il s’agit d’une famille très présente aux deux premiers siècles de la République, étroitement attachée aux débuts de l’histoire du tribunat de la plèbe et dont l’authenticité ne peut être mise en doute. Elle marqua puissamment l’imaginaire politique romain, sans doute à partir des prétentions de la famille elle-même qui construisit son identité sociale autour de la fonction tribunitienne comprise comme avocate des intérêts plébéiens[6]. En effet, les annalistes, à partir du souvenir de l’importance des Icilii à l’époque alto-républicaine, ont transformé les membres de cette famille en parangons de plébéiens radicaux et défenseurs des intérêts de la plèbe[7].

Notes

[1] E. Pais, Ricerche sulla storia e sul diritto pubblico di Roma, Rome : P. Maglione & C. Strini, 3, 1918, p. 99 ; W. Schulze, Zur Geschichte lateinischer Eigennamen, Zürich et Hildesheim : Weidmannsche Buchhandlung, 1904, p. 441 et R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 383.

[2] Cf. CIL, VIII, 16954 (= ILAlg, 1, 632) et 20201 (= ILAlg, 2, 3, 8344). Toutefois, si l’on suit AE, 1955, 138, dans l’inscription CIL, VIII, 16954 le gentilice Icilius serait une faute pour Iulius. De même, un fragment d’inscription trouvé en Espagne a livré les lettres ICILI mais le début étant absent il pourrait s’agir d’un [Ca]icili. L’inscription est de toutes les façons trop fragmentaire pour être d’un quelconque enseignement : cf. HEp, 7, 1997, p. 322.

[3] App., BC, 4, 27. Pour les variantes du nom, on se reportera à Appianus Historia romana. Ediderunt L. Mendelssohn et P. Viereck, vol. 2, Leipzig, 1905, p. 414.

[4] R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 613.

[5] Voir leur notice prosopographique respective. Les autres Icilii nous paraissent authentiques.

[6] E. Pais, Ricerche sulla storia e sul diritto pubblico di Roma, Rome : P. Maglione & C. Strini, 3, 1918, p. 101 est lui-même obligé d’en convenir.

[7] L’authenticité de cette famille est acceptée notamment par R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 383. Sur cette image, voir par exemple St. P. Oakley, A Commentary on Livy, Books VI-X, 1, Introduction and Book VI, Oxford : Clarendon Press, 1997, p. 99.