Fuluii

Les Fuluii sont une famille plébéienne d’origine latine. Ce nom, difficile à analyser, a parfois été interprété comme provenant de l’étrusque[1]. Toutefois, l’origine latine dérivée de fuluus est plus juste et ils sont très certainement originaires de Tusculum[2]. Il y a trace épigraphique de Fulvius à Rome par deux inscriptions[3]. Le reste du dossier épigraphique, bien plus tardif, renvoie de façon prédominante au Latium et à Rome[4]. Les Fuluii attestés sous la République sont nombreux et illustrent la réussite de l’implantation romaine de cette famille :

  • L. Fulvius Curvus (46), consul en 322 et maître de cavalerie en 316 ;
  • M’. Fulvius (22), consul en 318 ;
  • P. Fulvius Longus (78), triumuir coloniae deducendae en 313 ;
  • M. Fulvius Curvus Paetinus (47), consul suffect en 305 ;
  • Cn. Fulvius Maximus Centumalus (88), légat lieutenant en 302 ou 301, consul en 298, propréteur en 295 et dictateur en 263 ;
  • M. Fulvius Paetus (Paetinus) (96), consul en 299 ;
  • C. Fulvius Curvus (45), édile plébéien en 296 ;
  • M. Fulvius Flaccus (55), tribun de la plèbe en 270, duumuir aquae perducendae en 270, consul en 264 et maître de cavalerie en 246[5] ;
  • Ser. Fulvius Paetinus Nobilior (97), consul de la flotte en 255 et proconsul en 254 ;
  • Q. Fulvius Flaccus (59), consul en 237, censeur en 231, consul pour la deuxième fois en 224, peut-être légat lieutenant en 217, préteur urbain et de la flotte en 215, préteur urbain en 214, maître de cavalerie en 213, consul pour la troisième fois en 212, proconsul en 211, dictateur en 210, proconsul en 210, consul pour la quatrième fois en 209, proconsul en 208 puis 207 et pontife à partir de 216 ;
  • Cn. Fulvius Centumalus (42), consul en 229 et proconsul en 228 ;
  • C. Fulvius (10), questeur en 218 ;
  • Cn. Fulvius Centumalus (43), édile curule en 214, préteur en 213, consul en 211 et proconsul en 210 ;
  • Cn. Fulvius Flaccus (54), préteur en 212 ;
  • C. Fulvius Flaccus (52), légat lieutenant en 211, 209 ;
  • L. Fulvius (18), argentarius à l’époque de la guerre d’Hannibal ;
  • Q. Fulvius Gillo (69), légat envoyé en 203, peut-être édile curule en 202 et préteur en 200 ;
  • M. Fulvius Flaccus (56) décemvir agris assignandis en 201-200 et tribun de la plèbe en 198[6] ;
  • Q. Fulvius Flaccus (60), légat envoyé en 198, peut-être tribun de la plèbe en 197, édile plébéien en 189, préteur en 187, légat lieutenant en 181 et consul suffect en 180[7] ;
  • Q. Fulvius (28), tribun de la plèbe en 197[8] ;
  • M. Fulvius Centumalus (44), peut-être tribun de la plèbe en 198 et préteur urbain en 192[9] ;
  • M. Fulvius Nobilior (91), édile curule en 196, préteur en 193, proconsul en 192-191, consul en 189, proconsul en 188-187 et censeur en 179 ;
  • Cn. Fulvius (12), préteur pérégrin en 190 ;
  • M. Fulvius Flaccus (57), triumuir coloniae deducendae en 184, légat lieutenant en 181, peut-être tribun militaire en 180, peut-être légat envoyé en 171 et 170 ;
  • Q. Fulvius Nobilior (95), triumuir coloniae deducendae en 184, édile curule en 160, préteur vers 156, consul en 153 et censeur en 136 ;
  • Q. Fulvius Flaccus (61), édile curule en 184, préteur en 182, proconsul en 182-181, consul en 179, censeur en 174, pontife de 180 à 172 ;
  • Q. Fulvius (29), triumuir epulones à partir de 180 ;
  • M. Fulvius (Nobilior ?) (92), tribun militaire en 180 et peut-être légat envoyé en 171 ;
  • M. Fulvius Nobilior (93), tribun de la plèbe en 171, édile curule en 166, préteur en 162, consul en 159 et proconsul en 158[10] ;
  • Cn. Fulvius (13), préteur en 167 ;
  • Ser. Fulvius Flaccus (64), préteur vers 138 et consul en 135 ;
  • C. Fulvius Flaccus (53), préteur vers 137 et consul en 134 ;
  • un Q. Fulvius (30), mentionné sur une inscription campanienne d’époque gracquienne[11] ;
  • M. Fulvius Flaccus (58), triumuir agris iudicandis assignandis de 130 à 121, préteur vers 128, consul en 125, proconsul en 124-123, tribun de la plèbe en 122 et triumuir coloniae deducendae en 122-121[12] ;
  • Q. Fulvius Flaccus (62), fils du précédent ;
  • un Fulvius Flaccus (50) mentionné par Valère Maxime et qui est certainement celui défendu par C. Scribonius Curio en 114/113[13] ;
  • P. Fulvius Flaccus, accuse vers 112 M. Papirius Carbo de repetundis[14] ;
  • Cn. Fulvius (14), monétaire vers 106 ;
  • D. Fulvius (17), présent à Délos au IIe siècle ;
  • Fulvius (7), membre du concilium de Cn. Pompeius Strabo en 90 ;
  • Fulvius (1), légat de M. Antonius Creticus dans la guerre contre les pirates en 73 ;
  • Fulvius (2), mentionné dans les Saturnales comme un des amants d’une fille de Sylla ;
  • Q. Fulvius Lippinus (77), grand propriétaire terrien d’époque cicéronienne ;
  • Q. (Fulvius ?) Flaccus (63), compagnon de Milon en 57 ;
  • M. Fulvius Nobilior (94), chevalier, complice de Catilina, accusé et condamné pour meurtre en 54[15] ;
  • P. Fulvius Neratus (89), décrit comme lectissimus homo par Cicéron dans une affaire de prêt, il accuse Milon de sodaliciis e lege Licinia en 52[16] ;
  • Fulvius Postumus (103), officier dans l’armée de César en 48 ;
  • Fulvius Setinus (108), sénateur qui, en 46, voulut combattre dans l’arène mais n’y fut pas autorisé[17] ;
  • M. Fulvius Bambalio (40), mentionné dans les Philippiques ;
  • un Q. Fulvius (31), mentionné par Valère Maxime car il aurait été accusé de parricide à l’époque du second triumvirat ;
  • Fulvius (3), proscrit en 43[18].

Ce rapide parcours permet de constater l’importance d’une famille qui s’est maintenue jusque sous l’Empire. Si les premiers Fuluii apparaissent dans nos sources à la fin du IVe siècle, on peut cependant penser que leur arrivée à Rome est plus ancienne pour au moins deux raisons : les charges occupées sont d’emblée les plus hautes et témoignent d’une implantation forte ; la présence de cognomina dès cette époque indique une différenciation en différentes stirpes qui laisse là aussi penser à une arrivée antérieure du noyau familial. Par ailleurs, si l’on accepte l’idée que cette lignée est originaire de Tusculum, on pourra rappeler l’importance de cette ville au tournant des VIe et Ve siècles, bien attestée dans nos sources[19]. Ses citoyens jouissaient d’une citoyenneté potentielle depuis 493, ce qui rendait possible toute installation dans l’Vrbs. Puis, à partir de 381, la ville reçut la citoyenneté optimo iure[20]. Pour ces raisons, nous opterions volontiers pour une installation des Fuluii à Rome dès le Ve siècle et au plus tard au début du IVe siècle. Les premiers Fuluii à se démarquer furent les Fuluii Curui. Toutefois, dès le IIIe siècle apparut la branche des Fuluii Flacci appelée à demeurer la plus importante jusqu’à la fin de la République. À côté, les Fuluii Centumali, qui émergèrent à la fin du IVe siècle semblent s’être éteints dans le courant du IIe siècle tandis que les Fuluii Paetini, continués par les Fuluii Nobiliores se maintinrent aux côtés des Fuluii Flacci jusqu’à la fin de l’époque républicaine. La généalogie des différentes branches de la famille est bien connue et nous nous contenterons donc de revenir simplement ici sur le cas des Fuluii Curui qui, seul, nous intéresse directement[21]. L’édile plébéien de 296 se rattache en effet aux plus anciens Fuluii connus et, même si nous ne disposons pas d’élément sur son ascendance, il est logique de proposer la restitution suivante (qui était déjà celle de Münzer) :

Fuluii

Notes

[1] W. Schulze, Zur Geschichte lateinischer Eigennamen, Zürich et Hildesheim : Weidmannsche Buchhandlung, 1904, p. 170 et Rix, Das Etruskische Cognomen. Untersuchungen zu System, Morphologie und Verwendung der Personennamen auf den jüngeren Inschriften Nordetruriens, Wiesbaden : Otto Harrassowitz, 1963, p. 237. On notera cependant que A. Carnoy, « Étymologie des noms romains d’origine étrusque », Ant. Class., 25, 1956, p. 394-395 ne le mentionne pas et que J. Hadas-Lebel, Le Bilinguisme étrusco-latin. Contribution à l’étude de la romanisation de l’étrurie, Louvain : Peeters, 2004, p. 219-220 penche plutôt pour un équivalent étrusque emprunté au latin.

[2] RE, VII 1, 229 à l’article de présentation générale des Fuluii, complété depuis par BNP, 5, 579 ; P. Willems, Le Sénat de la République romaine, sa composition et ses attributions, Louvain et Paris : Peeters et A. Durand et Pedone-Lauriel, 1, 1878, p. 107 et p. 179 ; E. Pais, Ricerche sulla storia e sul diritto pubblico di Roma, Rome : P. Maglione & C. Strini, 3, 1918, p. 87 ; J. Suolahti, The Junior Officers of the Roman Army in the Republican Period. A study on Social Structure, Helsinki : Weilin & Göös, 1955, p. 157, p. 280 et p. 362 ; J. Reichmuth, Die lateinischen Gentilicia und ihre Beziehungen zu den römischen Individualnamen, Schwyz : Buchdruckerei Erwin Eberhard, 1956, p. 106 ; L. Ross Taylor, The Voting Districts of the Roman Republic, The Thirty Five Urban and Rural Tribes, Rome : American Academy in Rome, 1960, p. 216 ; J. Suolahti, The Roman Censors. A Study on Social Structure, Helsinki : Weilin & Göös, 1963, p. 291-294, p. 536-538 et p. 711 ; M. Humbert, Municipium et civitas sine suffragio. L’organisation de la conquête jusqu’à la guerre sociale, Rome : EFR, 1978, p. 158-159 et p. 330 ; Epigrafia e ordine senatorio. Atti del Colloquio Internazionale AIEGL (Roma, 14-20 maggio 1981), Rome : Edizioni di storia e letteratura, 1982, 2, p. 13 et p. 53 ; M. Cébeillac-Gervasoni, Les Magistrats des cités italiennes de la seconde guerre punique à Auguste. Le Latium et la Campanie, Rome : EFR, 1998, p. 205-206 ; St. P. Oakley, A Commentary on Livy, Books VI-X, 2, Books VII-VIII, Oxford : Clarendon Press, 1998, p. 543 et p. 761 et la notice de M. Flavius.

[3] CIL, I2, 36 datant d’avant la 2e guerre punique ; et CIL, I2, 615 (= VI, 1307 = ILLRP, 124 = SupplIt Imagines, CIL, VI, 1, Musei Capitolini, 137) qui date de la première moitié du IIe siècle ou qui est une copie augustéenne d’un document de cette époque.

[4] CIL, I2, 616 (= XIV, 2601 = ILS, 17 = ILLRP, 322 = SupplIt Imagines, CIL XIV, Latium uetus praeter Ostiam, 306, Tusculum) ; 635 (= ILS, 22 = ILLRP, 332, Capoue) ; 678 (= X, 3778 = ILS, 3397 = ILLRP, 715, Capoue) ; 643 et 644 (= IX, 1024 et 1025 = ILLRP, 473, ager Compsinus) ; 825 (= X, 8236 = ILS, 5742 = ILLRP, 340, Caiatia) ; 709 (= VI, 37045 = ILS, 8888 = ILLRP, 515 = SupplIt Imagines, CIL, VI, 1, Musei Capitolini, 2228, Rome) ; 938 (= ILLRP, 1056, Rome) ; 939 (= ILLRP, 1057, Rome) ; 1067 (= VI, 8263, Rome) ; 1068 (= VI, 8264, Rome) ; 1069 (= VI, 8265, Rome) ; 1322 (= VI, 20945, Rome) ; 1330 (= VI, 21644, Rome) ; 2380 (= XV, 3625, Rome) ; 2517 (= ILLRP, 995, Rome) ; 1479 (= XIV, 2820 = SupplIt Imagines, CIL XIV, Latium uetus praeter Ostiam, 435, Gabii) ; 2191 (= V, 1890 = ILLRP, 572, Concordia) ; 2268 (= II, 3302, Tarraconaise) ; 2276 (= II, 4371 = 6073, Tarraconaise) ; 2314 (= XIV, 5308 = ILLRP, 1175, Ostie) ; 2240 (= III, 14203 = ILLRP, 749, Délos) et 2260 (= III, 458 = ILLRP, 779, Samos).

[5] G. Niccolini, FTP, p. 85-86.

[6] Ibid., p. 105.

[7] Ibid., p. 105-106.

[8] Ibid., p. 105-106.

[9] Ibid., p. 105.

[10] Ibid., p. 123-124.

[11] CIL, I2, 825 (= X, 8236 = ILS, 5742 = ILLRP, 340, Caiatia). Cf. T. R. S. Broughton, MRR, 3, p. 94.

[12] G. Niccolini, FTP, p. 164-171 et J.-M. David, Le Patronat judiciaire au dernier siècle de la République romaine, Rome : EFR, 1992, p. 688.

[13] J.-M. David, Le Patronat judiciaire au dernier siècle de la République romaine, Rome : EFR, 1992, p. 697 et la question de l’éventuelle identification de ce Fulvius Flaccus avec le consul de 135.

[14] Ibid., p. 726.

[15] Cl. Nicolet, L’Ordre équestre à l’époque Républicaine (312-43 avant J.-C.), 2, Prosopographie des chevaliers romains, Paris : De Boccard, 1974, p. 886-887.

[16] J.-M. David, Le Patronat judiciaire au dernier siècle de la République romaine, Rome : EFR, 1992, p. 835.

[17] G. Ville, La Gladiature en Occident des origines à la mort de Domitien, Rome : EFR, 1981, p. 71.

[18] Fr. Hinard, Les Proscriptions de la Rome républicaine, Rome : EFR, 1985, p. 469-470.

[19] A. Alföldi, Early Rome and the Latins, Ann Arbor : UMP, 1963, p. 53-54.

[20] On connaît d’ailleurs l’exemple, en 458, de Mamilius récompensé pour son héroïsme. Voir M. Humbert, Municipium et civitas sine suffragio. L’organisation de la conquête jusqu’à la guerre sociale, Rome : EFR, 1978, p. 139, p. 154-161, p. 175 et p. 330-333.

[21] Pour les autres branches, voir RE, VII 1, 231-232 (auteur : Fr. Münzer).