Cominii

Les Cominii sont une famille assez ancienne d’origine italienne, présente à Rome depuis le début de la République. Son nom a fait débat. Schulze, suivi par Ogilvie et Ranouil, penche pour une origine étrusque : un dérivé de Cumni, attesté dans l’épigraphie de Clusium et de Pérouse mais par des inscriptions récentes[1]. À l’inverse, pour Rix, Salomies, Lejeune et la BNP il s’agit très probablement d’un nom osque en Comni. Ce nom est attesté par quelques inscriptions chez les Hirpins, les Samnites et en Lucanie mais, à l’exception d’une qui daterait de 250-200 (datation C. Letta)[2] elles sont de dates inconnues[3] ou probablement tardive[4]. Toutefois, le lien avec la Campanie pourrait être confirmé par le cognomen du consul de 501 : Auruncus[5]. Reichmuth propose également une origine italique à partir de Cominus[6]. Enfin, Suolahti hésite entre une origine latiale nord et sud, ou étrusque[7]. L’origine osque s’accorderait cependant mieux avec les quelques indices relevés par Ogilvie et qui laissent pressentir une origine méridionale des Cominii, depuis la zone entre la Campanie et le Latium[8]. Sur le plan de l’épigraphie latine, un P. Cominios est attesté pour la période sans doute postérieure à la deuxième guerre punique, à Venusia, ce qui concorderait bien, d’autant qu’un Cominius fut questeur municipal de Venusia à la fin de la République[9]. On notera toutefois qu’un Comenius et qu’une Comenia sont aussi attestés sur des inscriptions de Préneste du IIIe siècle[10]. Les inscriptions plus tardives ne sont d’aucun secours[11]. Sous la République, on peut recenser les personnages suivants :

  • Postumius Cominius Auruncus (16), consul en 501 puis en 493, légat envoyé en 488 et peut-être tribun militaire en 486 ;
  • Pontius Cominius (10), personnage jouant un rôle important au moment de la prise de Rome par les Gaulois[12] ;
  • L. Cominius (7), tribun militaire en 325 ;
  • L ? Cominius (2), tribun de la plèbe après 313 ;
  • Cominius, préfet de cavalerie en 179[13] ;
  • C. Cominius (4), chevalier romain ;
  • L. Cominius (8), chevalier romain[14] ;
  • Sex. Cominius (14), chevalier romain emprisonné par Verrès ;
  • Q. Cominius (13), chevalier romain césarien pendant la guerre d’Afrique ;
  • P. Cominius (11), chevalier romain[15] ;
  • P. Cominius (12), questeur municipal de Venusia vers la fin de l’époque républicaine.

L’évolution de la famille se dessine ainsi assez nettement. La branche patricienne, si on la tient pour authentique, s’éteignit très vite et n’est connue que par Postumius Cominius Auruncus[16]. En effet, seul le Chronographe de 354 mentionne, en 372, deux consuls nommés Prisco et Cominio. Cette notice, très isolée, est cependant fort douteuse et ne doit pas être retenue[17]. Ce patricien fut peut-être affecté par la disgrâce de Sp. Cassius dont il avait été le collègue, ce qui expliquerait la disparition des Cominii patriciens au profit des plébéiens[18]. On retrouve ensuite la branche plébéienne présente tout au long de la République mais avec une interruption au IIIe siècle. Elle semble par ailleurs s’être cantonnée à l’ordre équestre et avoir donc renoncé à une véritable ascension politique. Les Cominii se maintinrent ensuite sous l’Empire période pour laquelle nous en avons des attestations épigraphiques.

Notes

[1] Cf. H. Rix, ET, Cl 1.1531, 1.1532, 1.1534, 1.1535, 1.1536, 1.1537, 1.1539, 1.1541, 1.1542 et 1.1848 ; Pe 1.135. Pour l’origine étrusque, cf. W. Schulze, Zur Geschichte lateinischer Eigennamen, Zürich et Hildesheim : Weidmannsche Buchhandlung, 1904, p. 108, p. 166 et p. 354 ; R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 279, p. 732 et p. 780 et P.-Ch. Ranouil, Recherches sur le patriciat (509-366 av. J.-C.), Paris : Les Belles Lettres, 1975, p. 81-85.

[2] Imag. Ital., 1, p. 338-339 Antinum 1 (= H. Rix, ST, p. 66 VM 3).

[3] Imag. Ital., 2, p. 968 Aeclanum 10 (= H. Rix, ST, p. 92 Hi 2) et Imag. Ital., 2, p. 1211-1212 Teruentum 38 (= H. Rix, ST, p. 85 Sa 23, mais il pourrait s’agir d’un Comius et non d’un Cominius). Il s’agit tout de même sans doute, pour des raisons paléographiques, d’inscriptions postérieures à la deuxième guerre punique. En faveur de l’origine osque, cf. H. Rix, Das Etruskische Cognomen. Untersuchungen zu System, Morphologie und Verwendung der Personennamen auf den jüngeren Inschriften Nordetruriens, Wiesbaden : Otto Harrassowitz, 1963, p. 290 ; M. Lejeune, L’Anthroponymie osque, Paris : Les Belles Lettres, 1976, p. 109 et p. 141 ; O. Salomies, Die römischen Vornamen. Studien zur römischen Namengebung, Helsinki : Societas Scientiarum Fennica, 1987, p. 101 et BNP, 3, 619.

[4] Imag. Ital., 1, p. 80 Italia 6 (= H. Rix, ST, p. 131 Lu 50).

[5] C. Ampolo, « I gruppi etnici in Roma arcaica: posizione del problema e fonti », dans Gli Etruschi e Roma. Atti dell’incontro di studio in onore di Massimo Pallottino, Roma, 11-13 dicembre 1979, Rome : G. Bretschneider, 1981, p. 59.

[6] J. Reichmuth, Die lateinischen Gentilicia und ihre Beziehungen zu den römischen Individualnamen, Schwyz : Buchdruckerei Erwin Eberhard, 1956, p. 104.

[7] J. Suolahti, The Junior Officers of the Roman Army in the Republican Period. A study on Social Structure, Helsinki : Weilin & Göös, 1955, p. 155, p. 281 et p. 354 et Id., The Roman Censors. A Study on Social Structure, Helsinki : Weilin & Göös, 1963, p. 152-153, p. 533-534 et p. 709.

[8] R. M. Ogilvie, A Commentary on Livy : Books 1-5, Oxford : Clarendon Press, 1984, p. 732 (même si dans les addenda, p. 780, il revient sur ce point et donne aux Cominii une origine étrusque).

[9] CIL, I2, 402 (= IX, 439 = ILLRP, 691).

[10] CIL, I2, 127 (= XIV, 3101 = SupplIt Imagines, CIL XIV, Latium uetus praeter Ostiam, 530) et 128 (= XIV, 3102 = SupplIt Imagines, CIL XIV, Latium uetus praeter Ostiam, 510).

[11] CIL, I2, 1803 (= IX, 3435 = ILLRP, 637, pays des Vestins) ; 2163 (= V, 3582, Vérone) ; 2282 (= XII, 4389 = ILS, 6966 = ILLRP, 627, Narbonnaise) et 2667 (Ateste). L’inscription CIL, I2, 1803 a été revue par E. Dupraz, Les Vestins à l’époque tardo-républicaines. Du nord-osque au latin, Mont-Saint-Aignan : PURH, 2010, p. 297-301, n° V 19 mais l’auteur n’évoque pas ce Cominius. Cf. aussi, AE, 1948, 65 (= ILLRP, 296) pour un autre Cominius possible.

[12] J. Gagé, « Les superstitions de l’écorce et le rôle rituel de futs ou de troncs d’arbres dans l’Italie primitive », MEFRA, 91/2, 1979, p. 556-559 et p. 562 et P.-Ch. Ranouil, Recherches sur le patriciat (509-366 av. J.-C.), Paris : Les Belles Lettres, 1975, p. 81-82.

[13] T. R. S. Broughton, MRR, 2, p. 549 renvoie au numéro (1) de la Realencyclopädie mais le renvoi ne correspond pas.

[14] Sur les (4), (8), voir Cl. Nicolet, L’Ordre équestre à l’époque Républicaine (312-43 avant J.-C.), 2, Prosopographie des chevaliers romains, Paris : De Boccard, 1974, p. 846-847 et J.-M. David, Le Patronat judiciaire au dernier siècle de la République romaine, Rome : EFR, 1992, p. 827-828.

[15] Cl. Nicolet, L’Ordre équestre à l’époque Républicaine (312-43 avant J.-C.), 2, Prosopographie des chevaliers romains, Paris : De Boccard, 1974, p. 845-846.

[16] Sur ces questions, voir P.-Ch. Ranouil, Recherches sur le patriciat (509-366 av. J.-C.), Paris : Les Belles Lettres, 1975, p. 81-85, p. 114, p. 150-151, et p. 175-176.

[17] J.-Cl. Richard, Les Origines de la plèbe romaine : essai sur la formation du dualisme patricio-plébéien, Rome : EFR, 1978, p. 526.

[18] J. Suolahti, The Roman Censors. A Study on Social Structure, Helsinki : Weilin & Göös, 1963, p. 152-153, p. 163, p. 186.